Avr
01

Le Mont Valin 2009

Malin, le Valin! Jean Dufresne, Granby

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Jean est membre du club de ski de fond Parc du Mont Orford. Il nous livre ici le compte rendu de son escapade au Tour du Mont Valin le 21 mars 2009.

Départ pour Saguenay vendredi am. Je reprends la température de Chicoutimi et prépare mon fart de glisse tout en me disant qu’à -12 °C, ce va être comme au Camp Mercier. Donc même préparation des skis… Juste au cas où, j’apporte quelques klisters. En après-midi au Mont Valin, il faisait -10 °C, « comme demain », me disais-je. Première surprise : tout est glacé partout, car il a plu il y a quelques jours et il a fait +10 la veille. Je vérifie la neige damée : très glacée et transformée.

Jean est un des rares skieurs de fond qui a fait neuf courses du Circuit des maîtres en 2008-2009. Il tient un blogue fort intéressant sur le monde du ski de fond à http://logue_circuit_des_maitres.monblogue.branchezvous. com/

En bouffant ma crêpe au jambon dans la salle de fartage, deux joyeux lurons rentrent avec leurs skis de style classique fartés au klister. « Au diable le classique pour demain, je change pour le libre » me disent les frères Michel et Daniel Labrie. Moi, je m’étais inscrit au libre, mais je planifiais faire le classique pour pouvoir faire ma dernière course dans l’allégresse… Je n’avais pas apporté mes bottes de style libre pour être sûr que je ne changerais pas d’idée. Pas de tentation pour la facilité!

Alors je défarte mes skis de la dernière loppet et remplace pour la klister. Bien attendu, je remarque que j’ai oublié mon « binder » vert. Alors j’y vais pour le bleu VR30 (0 – 15 °C) de Swix comme base en me disant : « pas grave, il va faire -8 au départ ». Je finis avec une couche de -7 +2 °C. Mon test dans une côte est très satisfaisant. Je fais mon 45 minutes de réchauffement avec mes autres skis fartés avec des poussettes. Très satisfaisant aussi dans les pistes nouvellement damées, mais ils décrochent facilement dans les côtes. Retour à la salle pour récupérer mes biens. Discussions avec André Gauvin et son fils qui eux avaient mis une bonne couche de VR 50 (~0 °).

Avant mon départ, basé sur les prévisions de -12 °C de la préposée à l’accueil pour le lendemain matin et de 0 ° pour le midi, je décide de rajouter une klister plus chaude pour que ça grippe sur la glace comme les Gauvin. Puis, retour à l’hôtel Le Montagnais, très sûr de mon dernier choix… Le lendemain matin, je revérifie la météo au lever planifié assez tard, car mes skis sont prêts. Encore -12 annoncé pour Chicoutimi, mais je remarque un -22 pour l’aéroport. Ça me met la puce à l’oreille, car il faisait -18 dans mon auto. Je pars.

Mon auto neuve m’indique après quelques minutes qu’un pneu manque d’air. J’arrête. Tout semble ok, je repars. Une autre alarme me signale un autre pneu mou. Shit! Nouvel arrêt. Tout semble ok, pas le temps d’arrêter dans les garages, je verrai après la course. Mon plan B était de faire du pouce avec 2 crevaisons possibles… Ma tête d’ingénieur analysait ce qui se passait avec mes pneus tout en roulant : les pneus avaient été gonflés à la chaleur et là, il faisait trop froid. Donc la pression était diminuée…Je vérifie la température : -23 °C. Alors, je me dis qu’il sera impossible que la température soit de -8 au départ.

Hummm! Pas de binder assez dur sur mes skis à cette température, la glace va tout arracher. Alors, faisant ni 1 ni 2, ma décision rapide est de défarter et de recommencer mon fartage car il faisait trop froid, croyais-je. La confiance est de mise dans une course! Je cours à la salle de fartage (300 m). Je demande poliment à deux jeunes s’ils veulent bien me passer de leur « binder Toko » que j’ai remarqué sur leur banc.

Oui! Oui! Je baisse les yeux et je m’aperçois que c’étaient des jeunes universitaires du même club Orford que moi… Peu après, en toute humilité, je vois Phil Shaw demander de l’aide au farteur Bouchard des universitaires. Lui aussi avait oublié un klister chaud… Puis je me mets à m’installer debout dans le coin d’un établi où j’ai aperçu une prise pour mon séchoir. Un bon monsieur (? Pierre de Saguenay) m’offre d’utiliser ses serres mobiles pendant qu’il essaie ses skis. Oui bien sûr, merci!

On se présente. Lorsque je dis Granby, il me présente quelqu’un à ses côtés qui a passé quelques années à Granby avant de faire son cours en médecine à Saguenay. Ah que le monde est petit, une fois de plus! Alors je farte plus froid avec l’aide de mes nouveaux amis. Binder, puis Toko viola que j’avais (-6 -18) avec une couche sous le pied de VR 40 (-7 +2). Tests très positifs. On y va, départ dans 10 minutes… mais j’apprends qu’il est retardé de 30 minutes. Ouf! Temps de relaxer, de boire et de me préparer. Nathalie Langlois me surprend à rêver de ma future course. Bonne chance! Bonne chance! On annonce qu’il va falloir enlever nos skis pour 200 m environ dans la descente d’arrivée.

Puis le départ est donné.

C’est parti! Je me place en arrière des Morel, Babin, Mireault, en me disant que je vais les suivre au début car c’est sur le plat. Erreur! Ces jeunes coqs n’étaient pas suivables, alors je ralentis un peu en me disant qu’il fallait monter à plus de 700 m de la montagne de 980 m. Mon fart de glisse bleu (-6 -12) était trop mou, peut-être. Mais mes skis allaient bien car je pouvais monter les premières côtes.

À partir du 5 km jusqu’au 25e, nous passons de 200 à 734 m en hauteur, seulement avec quelques descentes de courts repos. Le pire est quand on tourne dans la montée du sentier de motoneige au 15e km: traces très glacées de 1 pouce de profondeur, avec le plein soleil frappant dessus. « C’est la montée de l’enfer » m’a dit Rock Ouimet plus tard. Tous ont sué dans cette montée. Et le klister des skieurs en avant de moi ne retenait plus, moi inclus. D’ailleurs, il n’y avait plus de pistes. Alors on canarde! Une fois en haut, que je me disais, ça va être le repos. Le profil du parcours montre un plateau de 12 km. J’espérais me rapprocher de mes amis du départ. « Morel, ça va être ta fête », me disais-je. Erreur! Car ce sont des vallons (rolling hills) éternels, assez difficiles avec le vent qui nous refroidissait. J’étais seul très souvent. Les seuls skieurs que je voyais étaient ceux du style libre qui me dépassaient dans un train d’enfer. Pas très motivant, mais bon, le soleil radieux me changeait les idées. Merci pour vos encouragements Michel, Daniel, Nathalie, Pierre-Yves…Enfin le 8e km, et la descente qui commencera bientôt. Nous passons de 700 à 230 m en 6+ km.

Puis dans une descente, on annonce une pente raide. « Je présume que c’est là qu’on enlèvera nos skis. » me disais-je. Il y avait des cônes avec une jolie dame qui raclait la neige. J’arrête avec un peu de difficulté en présumant que c’était l’endroit. « Oui » me dit-elle en voyant mon point d’interrogation dans les yeux. Puis on court sur le mélange de glace et neige.

Je dérape souvent sur des plaques, mais je tiens le coup, car j’aime les descentes rapides de montagne! Enfin l’arrivée, en poussant fortement pour éviter qu’un poursuivant dépassé dans le dernier km me dépasse. 3 h 20. Je visais 10 minutes de moins comme à Mercier, mais je suis content. Mes compétiteurs de mon groupe d’âge sont vraiment forts. Félicitations messieurs! Je vous lève mon chapeau aussi haut que le Mont Valin. Il ne manquait que Coefficient Junique et Bernard Carré en classique avec nous.

Après quelques minutes, je vois Gauvin fils qui cherche son père. « Pourquoi sembles-tu pressé de le voir ? » lui demandaije. « Il est disqualifié et je veux savoir pourquoi il a traversé les cônes dans la côte », me dit-il et en continuant « il parait que son ami Beaulieu le suivait et lorsqu’il a entendu le préposé à la sécurité parler de disqualification, il est remonté au pas de course en haut et redescendu en bas, la langue dans les talons. » Il est arrivé environ 4 minutes plus tard, m’a dit Gaétan à la cérémonie de clôture.

Puis, mon amie Nathalie Langlois arrive avec l’air un peu triste. « Mes cuisses n’ont pas suivi ma volonté » me dit-elle. Elle me raconte que la Machine Louise Martineau a cassé son bâton au départ, qu’elle a couru à son auto en récupérer un autre puis elle est repartie gaiement. « Louise m’a dépassé dans la Montée de l’Enfer, il me semble. Je suis arrivée 10 secondes après elle, et elle méritait pleinement cette deuxième place toute catégorie » me confia-t-elle.

Toute une journée! Pas toujours en plaisir, mais très très agréable de côtoyer tout ce beau monde dynamique que sont les maîtres!

À bientôt au Camp des maîtres de décembre 2009!

Avr
01

Loppet Boréal 2009

par Paul Junique, Verdun

Je viens de terminer mon entraînement et je range mes skis dans leur poche. « Hey Paul! C’est où que tu te gèles les doigts en fin de semaine? » Mon voisin de stationnement s’enquiert de mes prochaines activités. C’est incroyable, il ne sait même pas que c’est la fin de semaine de la Loppet Boréal. Mieux que ça, il pense que c’est une compétition d’hommes forts. Il ne m’a pas regardé comme il faut… Je vais prendre cinq minutes pour lui expliquer.

La Loppet Boréal (qui, soit dit en passant, en est à sa cinquième édition), c’est un événement de ski de fond qui propose aux participants des parcours de 7, 14, 27 ou 54 km. Pour ceux qui veulent en avoir pour leur inscription, il y a aussi un 103 km. Dans le fond, je suis mieux de lui raconter la course de cette année (des fois que ça lui donne le goût de s’inscrire l’an prochain).

« Le commandant Junique et son équipage sont heureux de vous accueillir à bord du Subaru Outback 105, à destination de Forestville. Le trajet est prévu pour une durée de 8 heures et la température au sol est de -9 oC. Des cafés seront disponibles dans les dépanneurs où nous remplirons nos réservoirs. Il n’y a pas de toilette à l’arrière du véhicule et nous vous rappelons qu’il est strictement interdit de fumer en cachette. »

C’est jeudi, Micheline et moi venons de décoller pour Forestville. Tout est prêt: le matériel de ski, les lunchs pour la route, le guide touristique, le bulletin météo et un sac de bonne humeur. J’ai hâte de retrouver les amis et la région. Dodo au Lac Beauport chez un copain. On passera une partie de la soirée dans un igloo qu’il a construit avec ses enfants, dans son jardin C’est drôlement commode: tu poses ta bière sur le sol et elle refroidit toute seule.

Vendredi: levés de bonne heure, nous reprenons la route pour aller pique-niquer à Saint Siméon, au bord de l’eau, sous un soleil éclatant (5 oC). Le fleuve charrie des tonnes de glace qui s’entrechoquent dans un vacarme métallique. Fascinant!

À notre arrivée à Forestville, la pluie commence à tomber. Après avoir salué un groupe de skieurs de Québec, on file récupérer nos dossards. Bernard (Leclerc) nous accueille. Il m’informe que demain, tous les départs seront retardés d’une heure en raison des conditions météo. Les jeunes bénévoles qui remettent les dossards(1) et trousses de renseignement sont d’une politesse et d’une amabilité extrêmes. Ils méritent un gros bravo. Ça fait plaisir d’entendre des jeunes s’exprimer aussi correctement et faire preuve d’autant de sérieux et de courtoisie(2). Ralph Hendrix, de Californie, est de nouveau sur la liste des participants. Mes félicitations!

Je retourne à la chambre pour une partie de Lego(3) avec Micheline, une sieste et une douche. Ensuite, visite à la Marchande de Sable(4). Si vous n’êtes pas allé dans son atelier, vous devriez être pénalisé pour la prochaine course. Il faut aller voir les oeuvres de Rose-Marie (Gallant). Des tableaux peints avec du sable aux sculptures de sable insérées dans des bouteilles de verre, tout est magnifique. La créativité, la bonne humeur et la joie de vivre de Rose-Marie ont l’effet d’un vrai rayon de soleil au milieu de cette soirée pluvieuse et morose.

Souper avec Frédéric et Mario (Brochu). Le buffet est toujours aussi apprécié. L’ingestion des desserts et du coulis de framboise procure un grand moment de bien-être. Les participants arrivent peu à peu: Diane(5) (Bouchard), Lise (Audet), Renée (Hamel), Francis (Roy), Michel (Labrie), Pierre (Hétier), Sté- phane (Martel), et j’en oublie…

Un peu de repos pour aider à la digestion et il est temps de se rendre à la réunion d’information du 103 km. Chaque participant a apporté sa réserve personnelle d’anxiété et de stress, pour en faire partager les amis. Il faut préciser que les conditions météorologiques sont plutôt angoissantes: 2 oC, pluie abondante prévue pour une partie de la nuit, refroidissement annoncé pour la matinée, avec des vents violents. La machinerie ne peut rien contre une telle adversité.

  • Tous les départs sont retardés d’une heure. Il sera décidé demain matin à 6 h si le trajet du 103 km est maintenu ou si 3 boucles de 17 km le remplaceront. Tout dépendra de la possibilité de tracer et de concasser la glace avant le passage des skieurs.
  • Les motoneigistes qui assurent la protection des participants sont toujours présents en aussi grand nombre.
  • Il y aura une vingtaine de pompiers disponibles sur la piste en cas de pépin (ce qui fait dire à Mario: « Si il y a un feu, Forestville est une perte totale »).
  • Les gels sont disponibles dès le cinquième ravitaillement(6).

Mauvais dodo, ponctué de brefs réveils provoqués par les rafales de vent. À partir de 4 h, les traceurs de pistes et les motoneigistes ont commencé à préparer la piste. Il faut rendre hommage à ces braves qui ont rendu l’événement possible. Sans leur courage et leur persévérance(7), la course n’aurait pas été faisable. Ils ont tellement bien travaillé qu’à la réunion d’information(8) de 6 h les organisateurs ont annoncé la tenue du 103 km, tel que prévu. Bravo, Bravo, Bravo! Il y a un petit Jésus pour les skieurs et pour Forestville.

Je retourne à la chambre prendre un café et me préparer. Chaudement habillé, je me dirige vers la ligne de départ pour tester mes skis. Croyez-le ou non, ma poche de skis qui contient deux paires de skis et trois paires de bâtons est partie au vent… J’ai pas testé longtemps. C’est en char à voile que je devrai courir.

Le thermomètre indique -14 oC. Avec le facteur éolien il flirte avec les -26 oC. Je vais encore me geler un bout… Les tentes et les banderoles sont à terre. Les motoneigistes et les officiels sont vraiment courageux. Bon, on y va! Pour nous éviter des engelures, les officiels nous réunissent dans une salle pour vérifier les numéros de dossards et les présences. Il y a du stress partout. J’arrive difficilement à m’en dépêtrer. Par chance, on est vite parti en courant sur la ligne de départ (déplacée à l’abri du vent) et une minute après, les 27 gladiateurs démarraient leur périple.

Pour faire comme les collègues, j’ai pris une gourde. Ça donne une contenance et je peux même y mettre de l’eau. Si je ne suis pas très présentable en passant devant les photographes, je pourrais me nettoyer le visage. Je transporte aussi deux barres Mars (vestiges du Marathon Canadien). Si je rencontre des enfants, je pourrais les leur donner (à condition qu’ils soient avec leurs parents, je ne veux pas passer pour un vieux cochon).

Même scénario que l’an passé: un groupe de jeunes me distance rapidement. Je ne force pas pour rester avec eux, je veux me remplir les narines de l’odeur du MacDo. Cette année, je roule seul, personne ne me suit. Pourtant je me suis mis du sent-bon sous les bras et j’ai lavé mes combines. Je vais donc me concentrer sur ma technique. Et j’en ai bien besoin. La piste est irrégulière, jonchée de branches, et pleine de morceaux de glace. Dans ces conditions, il est impossible de faire du one-skate. C’est en two-skate et en déphasé que je vais me taper les 103 km(9). Concentré sur mon équilibre (instable), j’essaie de ne pas me doubler, ça ne sert à rien de s’exciter, il reste un bon bout à skier. Le vent (de face) est effrayant. Prévoyant, j’ai mis des bobettes blindées.

Aux postes de ravitaillement, je prends le temps de siroter un verre de jus et de remercier les bénévoles. Leur sourire est réconfortant et m’accompagne de relais en relais. Cette année je découvre les carrés aux dates réchauffés dans la poêle. Génial( 10)! Je ne consomme pas de Power Gel, pas besoin de drogue pour rester gelé. À partir du 50e kilomètre, les organisateurs ont placé le vent de dos pour qu’on puisse se vider la vessie sans en prendre plein les culottes. On va pouvoir se geler les fesses. Ça va beaucoup mieux: je m’entends râler. Pour passer le temps, comme je suis tout seul, j’essaie de trouver des occupations: je prends des relais avec moi-même, je chante (c’est pas tous les jours que je peux le faire sans déranger personne), je m’encourage dans les montées « Lâche pas, mon Paul, t’es capable » – « Go Paul, Go! » – « Le numéro 105 vient de te rattraper, ne le laisse pas doubler ». Je n’ai même plus le goût de me conter des blagues, je les connais toutes.

Sans vraiment penser à mal faire, je rattrape et dépasse un skieur du groupe de tête. Par contre, je me sens suivi. De temps en temps Frédéric (Brochu) me remonte et reste collé derrière moi. Je le lâche dans les montées et finalement je ne le reverrai plus, jusqu’à l’arrivée.

La Loppet Boréal, c’est pas un jeu vidéo. Quand tu es tanné, tu ne peux pas mettre à « Off » et prendre un break jusqu’au lendemain. Pas question de se battre contre un ennemi virtuel. C’est contre soi-même, contre les autres coureurs, contre l’ennui, contre la solitude, contre la douleur et contre les éléments qu’il faut en découdre. Et ce n’est pas toujours facile. Par contre, j’ai pris le temps d’être romantique et d’apprécier le paysage, les couleurs, les odeurs(11), le jeu des ombres sur la glace ainsi que la gentillesse et les encouragements des bénévoles. Un grand MERCI!

Je me paye aussi une petite hallucination: une skieuse en classique. Il me faudra dix minutes pour réaliser que c’est une des participantes au 54 km classique. Youpi, j’ai rejoint leurs traces. Il ne doit pas me rester grand kilométrage. Effectivement, le terrain d’aviation se pointe le bout du tarmac. La ligne d’arrivée est proche. Ça sent la médaille. Je réalise dans l’avant dernier kilomètre qu’un de mes compétiteurs est dans ma ligne de mire. Trop tard pour essayer de le rejoindre. Bravo Yves (Deguire), tu m’as battu. Je vais quand même m’efforcer de paraître à mon avantage pour franchir la ligne d’arrivée: un coup de peigne, je redresse ma tuque(12) et j’essuie mon visage avant de faire semblant de sprinter.

Cette année encore, ce sont les becs de Micheline qui m’ont ramené à la vie. Un autre beau moment. Ensuite je me suis plié aux exigences des médias et j’ai bredouillé quelques mots pour remercier le journaliste qui me présentait son micro (en fait, je pensais qu’il m’offrait une bière). D’après Micheline, c’est Frédéric qui a eu le plus beau sourire sur la ligne d’arrivée. Il faut que j’en parle au coach et que je m’entraîne plus sérieusement devant mon miroir, pour l’an prochain. Je n’ai que deux engelures sur les joues. Je m’améliore.

Ce n’est pas fini. Il reste les vraies affaires. L’apéro et le banquet! C’est aussi pour ça que je vais à la Loppet tous les ans. À Forestville, on sait recevoir. Accompagné de Micheline, je me suis rendu au complexe Guy-Ouellet où bénévoles, commanditaires, officiels et participants se réunissent pour terminer la soirée. Nous avons complètement loupé notre entrée, nous sommes arrivés par les cuisines. J’ai stationné devant la mauvaise porte… J’ai quand même récupéré un verre de vin pour ne pas avoir l’air tout nu. Les demoiselles qui s’occupent de l’accueil sont vraiment charmantes et leur merveilleux minois inaugure bien la soirée. On s’y retrouve avec Chantal (Métivier), Rose-Marie, Frédéric et Mario, Michel, Serge, Stéphane et Yves (Deguire). Mario voulait la table no 911. Il pense que c’est celle qui a statistiquement le plus de chance d’être appelée en premier pour le souper… (On n’a pourtant pas l’air si maganés que ça).

En admirant les photos des participants en action (qui défilent sur un écran géant), je réalise que je n’étais pas seul à avoir des problèmes de technique durant la course. Le style laisse vraiment à désirer. Le taux d’alcoolémie et le brouhaha s’amplifient (c’est à cause de la broue). Les conversations sont de plus en plus animées. Et le bonheur continue de couler un peu partout (y compris sur ma table, je viens de renverser mon verre de vin). Une voix vient d’annoncer au micro: « Les résultats sont affichés prés du bar». Quelle brillante idée. Satisfait ou non de sa performance, l’athlète peut noyer sa joie ou sa peine dans la boisson, sans avoir à se déplacer. Les préposés au bar n’auront pas la tâche facile. Renée Hamel réitère l’exploit de l’an passé en rentrant première femme. Chez les hommes, Michel (Labrie) est rentré premier, suivi de près par Gatan (Beaulieu). Bravo à tous!

Je dois aussi rendre hommage aux participants des autres courses (7 km, 14 km, 27 km et 54 km). Comme nous, ils ont souffert du froid et du vent. Leur performance est tout aussi remarquable. Si je les mentionne un peu moins que celles de mes amis du 103 km, c’est parce que j’ai skié un peu moins longtemps avec eux. Le repas est délicieux (tout spécialement le boeuf bourguignon. Quand aux desserts, cette année j’ai imaginé une nouvelle tactique pour en profiter un peu plus. Je les consomme sur place, sans retourner à ma table. J’ai pu déguster quatre morceaux de gâteau, sans me déplacer.

C’est presque terminé. Il faut rentrer à l’hôtel. Je n’ai pas eu le courage d’aller à la chambre 151 continuer la veillée. Excusez-moi, la fatigue, sans doute. Pour tous ceux que je n’ai pas nommé, pour tous les bénévoles qui m’ont encouragé, pour les organisateurs qui poussent la délicatesse jusqu’à nous remettre une coupe de champagne sur le podium et une photo souvenir, pour les motoneigistes dont on a envahi les pistes pour la fin de semaine, pour tous les jeunes qui nous ont encadrés, pour tous les habitants de Forestville, pour le Directeur de l’école, le Maire, le représentant de l’Hydro, le personnel de l’hôtel…un gros MERCI!

Il reste les trois mousquetaires: Dave, Gino, Steve. Vous avez fait du Défi Boréal bien plus qu’une épreuve. Vous l’avez transformé en un rendez-vous d’ami(e)s, une réunion de famille. BRAVO!

Amitiés à tous, à l’an prochain.

Dernière nouvelle. Je viens d’apprendre avec tristesse l’accident de Céline Boilard qui a chuté dans les derniers kilomètres du 54 km et s’est brisé l’humérus. Je m’en veux de ne pas avoir pris de ses nouvelles plus tôt. J’avais attribué l’absence de son beau sourire au banquet à la fatigue ou à un retour précipité au bercail. Notre vaillante skieuse était en pleine « reconstruction », à l’hôpital.

Céline: tous les skieurs qui ont eu le plaisir de te rencontrer à Forestville s’unissent autour de moi pour te souhaiter un prompt rétablissement. On t’attend sur les pistes.

– . – . – . – . –

(1) J’ai le numéro 105, je me rapproche de la tête.
(2) Croyez-en l’expérience d’un vieux prof, c’est rare.
(3) J’espère que le bruit des pièces qui s’emboîtent n’a pas trop dérangé nos voisins de chambre, Michel (Labrie) et Stéphane (Martel).
(4) C’est elle qui prépare les médailles et les trophées des vainqueurs. On en reparlera au banquet.
(5) Son sourire est contagieux. Pour ceux qui se demandent si Diane a skié le 54 km ou le 103 km, mentionnons tout de suite qu’elle a skié le 103 km. Mes félicitations!
(6) J’ai l’impression qu’avec le vent prévu, on n’aura pas besoin des gels pour se geler.
(7) Il faut effectivement une sacré dose de courage pour aller tracer en pleine tempête, par un froid sibérien.
(8) Il y avait même un traducteur pour aider les deux Américains qui participent à la Loppet. Il leur a tout expliqué: « It’s cold, take care ».
(9) J’apprendrai en fin de course que tous les copains ont eu les mêmes problèmes.
(10) Avis aux organisateurs: prenez vite un brevet pour les carrés aux dates frits, il va y en avoir sous peu dans toutes les courses.
(11) Je reniflai les carrés aux dates un kilomètre avant les ravitaillements et les échappements des motoneiges un kilomètre après leur passage.
(12) Non, ma tuque rose n’est pas à vendre. C’est un souvenir de la parade gaie. J’y tiens.
(13) Je remets ça l’an prochain.

Mar
01

Championnat du monde 2009 à Autrans France

Bien que j’aime l’hiver au Québec, comme vous l’avez sans doute vécu, décembre et janvier ont été particulièrement rigoureux. Sans me tromper je savais que la température serait beaucoup plus douce dans les montagnes françaises, même à la fin janvier.

Je suis arrivé une semaine avant les championnats et c’était le printemps, il pleuvait à Lyon ainsi qu’à Autrans, là où avait lieu les championnats. Ce village est au centre d’un plateau à 1050 m d’altitude. Il est entouré de montagnes à 1600 m et est situé à 35 K à l’ouest de Grenoble. Ce ne sont pas les Alpes, ces dernières sont à l’est de Grenoble. Heureusement, le soir de notre arrivée, il y a eu une bonne bordée de neige et nous avons eu du très beau ski toute la semaine suivante. Je dis « nous » car je partageais un appartement avec une bonne amie que peut-être vous connaissez, Christianne Angelucci. La porte de notre appartement était à 20 m des pistes!

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Mar
01

La Coupe Rolland-Michaud au Camp des maîtres

Cette coupe doit son nom à celui qui représente un modèle pour plusieurs membres de l’AMSFQ. C’était une activité de type « funny race» où les règlements, le parcours et les pénalités variaient selon l’humeur du jour des officiels.

Traditionnellement donnée au Camp des maîtres sur un format ‘funny race’, la Coupe Rolland Michaud subit une cure de rajeunissement en 2008-2009, puisqu’on propose aux membres de s’inscrire en équipe mixte lors du Pentathlon des Neiges ayant lieu sur les Plaines d’Abraham à Québec en février 2009.

Voici quelques articles pertinents au sujet de Rolland Michaud:

 

Jan
01

Camp des maîtres 2008

Merci la vie!
par Sylvie Gaudet, Club IMCO, Montréal

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Lors du Camp des maîtres en ski de fond de décembre 2008, j’ai eu la chance de vivre une belle expérience que j’aimerais partager avec vous.

Tout a commencé le vendredi soir lors du souper où nous étions, Johanne Lachapelle et moi, à table avec Jean-Yves Babin, un des organisateurs de la course de 10 kilomètres du lendemain. Il nous a demandé si nous voulions être bénévoles car il avait besoin de deux skieurs pour fermer la piste à la fin de la compétition. Nous avons accepté.

On nous avait informé que Rolland Michaud était inscrit à la compétition et qu’il serait probablement le dernier à se présenter au fil d’arrivée. C’est lui que nous devions suivre pour fermer la piste. Vous connaissez Rolland Michaud? Un jeune athlète de 87 ans, tout lycra! Bien des avertissements nous avaient été faits concernant la vitesse de croisière de Rolland et les risques d’avoir froid en l’accompagnant.

Johanne et moi étions donc au rendez-vous le lendemain matin, à 10 h pile, il faisait –15o C. Le signal de départ ayant été donné, on a regardé Rolland passer et on a attendu un bon moment (10-15 minutes) avant de nous élancer sur la piste, pour ne pas le rattraper trop vite. Puis, nous sommes parties bien lentement, jasant même, chemin faisant. Johanne portait son manteau de duvet craignant d’avoir froid. Après quelques kilomètres, on a commencé à se demander comment il se faisait que nous ne le croisions pas. On ne l’apercevait même pas à l’horizon… Espérant le rencontrer au détour d’une montée ou au bas d’une descente… RIEN, aucun signe de Rolland Michaud. Le doute commençait à s’emparer de nous : avait-il « piqué » au travers des bois? Notre ami François Trudeau lui avait-il fourni de l’EPO illégalement?… À deux kilomètres de l’arrivée, reconnaissant que nous nous étions méprises sur ses performances, nous avons dû sprinter. On commençait à avoir chaud… Johanne regrettait amèrement d’avoir mis son duvet. Et là, notre amour propre commençait à en prendre un coup!

 

Rolland Michaud

Rolland Michaud, bien entouré de ses goupies au Camp des maîtres 2008 à la Forêt Montmorency.

Heureusement, nous l’avons rejoint. Il était escorté par Réjean et Lise, donnant le meilleur de lui-même. Plus nous approchions de l’arrivée et plus il y avait de personnes qui l’encourageaient et l’accompagnaient. Juste avant la dernière descente on a entendu quelqu’un lui crier : « Rolland, c’est la dernière descente, si tu veux, tu peux laisser traîner tes bâtons ». À ce moment, Rolland a pris ses bâtons, les a mis sous ses bras et s’est mis en position de « downhill ». Il a terminé la course ainsi.

Je crois que tous ceux qui ont assisté à ce moment ont été touchés. On avait tous l’oeil un peu humide quand on est allé le féliciter… Et Rolland en souriant, a regardé le ciel et a proclamé : « Merci la vie! ».

Moi, je dis « Merci Rolland » ce fut un honneur de fermer la piste derrière (ou avec??) toi… et un moment marquant de mon Camp des maîtres.

Jan
01

Surentraînement – prévenir et traiter

Le surentraînement : le prévenir, le traiter

  • Guy Thibault, Direction du sport et de l’activité physique, ministère de
    l’Éducation, du Loisir et du Sport ; Département de kinésiologie,
    Université de Montréal
  • Jonathan Tremblay, Département de kinésiologie, Université de Montréal; Centre national multisport-Montréal

Qu’est-ce que le surentraînement?

Dans le but d’optimiser leurs performances, les athlètes doivent s’entraîner de sorte à faire évoluer, ou du moins maintenir, les adaptations acquises à la suite des entraînements précédents. Une charge d’entraînement trop faible ou inversement trop intense ou fréquente peut mener à une diminution de la performance. Ceci pose un défi de taille pour les entraîneurs et intervenants du milieu sportif qui doivent déterminer la charge d’entraînement précise qui optimisera les performances des athlètes, sans les sous-entraîner ou les sur-entraîner. De plus, la conjugaison de la vie sportive, étudiante ou professionnelle et sociale peut causer des pressions additionnelles qui peuvent également nuire aux performances.

La fatigue aiguë provoquée par un stress tel qu’une ou plusieurs séances d’entraînement est transitoire et parfois nécessaire pour provoquer des adaptations. Par contre, lorsque cette fatigue devient chronique et s’installe sur une base plus prolongée, et que la performance demeure inférieure pendant plusieurs jours, même après un ajustement des charges d’entraînement, il est alors possible que l’athlète soit victime d’une forme de surentraînement.

Comment le détecter?

Le surentraînement est défini comme une réduction des performances et un état de fatigue chronique persistant sur une période d’un à plusieurs mois. Il est très difficile de poser un diagnostic de surentraînement puisqu’il ne peut être effectué qu’en excluant tout autre influence possible sur la performance ou l’état émotif. La détection précoce et sans équivoque est pratiquement impossible puisque le seul signe certain est une baisse de performance en compétition ou à l’entraînement n’étant pas causée par une alimentation ou un sommeil inadéquat, un stress psychologique ou environnemental, ou encore une affection ou désordre quelconque. La prévalence du surentraînement semble toutefois relativement élevée, particulièrement chez les athlètes de haut niveau. En général, on peut observer les signes et symptômes associés au surentraînement chez environ 10 à 60 % des athlètes, l’incidence étant plus élevée dans les groupes sportifs de haut niveau. Plus de 90 signes et symptôme sont été rapportés par les athlètes surentraînés.

Le plus important étant la baisse de performance. Plusieurs marqueurs physiologiques ont été identifiés comme paramètres potentiels de détection du surentraînement. Ils requièrent le dosage sanguin de certaines hormones, ou peptides ou l’interprétation de la variabilité de la fréquence cardiaque. Malheureusement, aucun de ces marqueurs n’est assez valide et fidèle pour permettre un diagnostic clair et précis du surentraînement. On observe toutefois certains signes et symptômes qui sont plus courants tels que les infections des voies respiratoires supérieures, la perte d’appétit, la perte de poids inattendue, les perturbations du sommeil et, surtout, les symptômes dépressifs et anxieux. La grande variabilité interindividuelle dans l’expression des signes et symptômes rend l’identification du surentraînement difficile pour l’entraîneur. Celui-ci doit donc être à l’écoute des athlètes, mesurer régulièrement leurs performances et en suivre l’évolution en plus d’être à l’affût de la réponse des athlètes aux entraînements.

Comment le traiter?

Lorsque le surentraînement est suspecté chez un athlète, celui-ci devrait consulter un médecin. Le médecin pourra tout d’abord exclure d’autres affections qui peuvent présenter des signes et symptômes semblables au surentraînement. Une fois ces affections exclues, le diagnostic pourra être posé. Chez les athlètes qui présentent des signes et symptômes de surentraînement qui évoluent depuis peu de temps, on suggère le repos complet pendant 48 h (pendant une fin de semaine, par exemple). Durant cette période, on encourage l’athlète à dormir le plus possible. Si les signes et symptômes ne sont pas sévères, cette courte période de repos pourra être suffisante.Toutefois, si cette période de repos ne provoque pas une certaine atténuation des symptômes, une période de repos prolongée combinée à un soutien psychologique et une attention particulière à la diète seront probablement nécessaires. Une fois les signes et symptômes résolus, l’athlète pourra reprendre un programme d’entraînement qui aura été adapté pour éviter la réapparition du surentraînement.

Comment le prévenir?

Le surentraînement est provoqué par un déséquilibre entre la charge d’entraînement et la récupération. Il est donc primordial pour l’entraîneur et l’athlète d’évaluer la charge d’entraînement, ce qui n’est pas facile à faire. Plusieurs recherches ont tenté d’élaborer des méthodes d’évaluation de charge d’entraînement qui sont objectives et valides, mais il n’y a pas consensus en cette matière. De plus, de nombreuses recherches ont montré que les réponses physiologiques à une charge d’entraînement constituent de mauvais indicateurs du surentraînement à cause de leur grande variabilité. Reste alors les évaluations subjectives qui, combinées à la mesure de la charge externe (le volume, l’intensité et la difficulté de l’exercice), semblent les plus fiables et sensibles. Ces méthodes consistent à sonder régulièrement les athlètes à l’aide de courts questionnaires évaluant, sur une base quotidienne à l’aide d’une échelle de critères, plusieurs facteurs tels que les niveaux de fatigue, de dépression, de stress, de motivation, de douleur, de perturbations du sommeil et de la qualité de l’alimentation. En combinant ce suivi avec celui des performances sur des tâches précises, on obtient un profil de l’athlète permettant d’observer comment il répond aux charges d’entraînement et d’ajuster la récupération. Afin d’éviter le surentraînement, outre la charge d’entraînement en elle-même, il est bien entendu que l’entraîneur se doit de respecter certaines principes clés de l’entraînement : les principes d’adaptation, d’individualisation, de progression, de récupération et de variation. Par exemple, un programme d’entraînement monotone manquant de variété dans les stimuli est susceptible d’entraîner une perte de motivation, un niveau de fatigue plus élevé et une baisse de performance. Ces signes et symptômes pourront toutefois être détectés par un outil de suivi efficace et l’entraîneur pourra s’ajuster en conséquence.

Quoiqu’il ne semble pas y avoir, pour le moment, un indice singulier permettant de l’identifier, il n’en demeure pas moins que le surentraînement est un problème réel qu’il ne faut pas sous-estimer. Dans certains cas, il peut avoir des répercussions graves sur la carrière et la vie de l’athlète. Il est important pour l’entraîneur et les autres intervenants qui interagissent avec l’athlète qu’ils puissent échanger et adapter leur intervention en fonction des besoins de l’athlète. En étant à l’écoute, en suivant l’évolution de ses performances, notant toute diminution prolongée de celle-ci et en étudiant les réponses subjectives de l’athlète, l’entraîneur a de bien meilleures chances d’influencer de manière positive la carrière de l’athlète, et la sienne.

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Déc
24

Handicap version 2 : plus proche de l’idée que l’on se fait du ski de fond

Rock Ouimet, Québec
Avec la collaboration de Ronald Faltus, Pierrefonds

Dans cet article, nous présentons la seconde version du modèle de calcul du handicap. Cette version est basée sur les résultats des Championnats du monde des maîtres en ski de fond durant les années 2000 à 2008. Le nouveau modèle corrobore des données indépendantes collectées lors de la Keskinada au cours de ses 30 ans d’existence, ainsi que les observations anecdotiques rapportées sur la pratique du ski de fond.

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Déc
01

Pour se dégourdir les skis cet hiver – Défi Boréal


Pour se dégourdir les skis cet hiver…
par Paul Junique, Verdun

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La neige n’est pas tout à fait arrivée et vous vous demandez quand vous rembarquerez sur vos planches pour relever un autre défi. En attendant, pourquoi ne pas rêver à vos exploits de la saison 2009? Les deux textes qui suivent vous mettront le fartage aux skis (ou l’eau à la bouche) en vous présentant deux épreuves relaxantes et amusantes, à la portée de tous (toutes).

Défi Boréal (100 km patin)

La fébrilité me gagne, le Défi Boréal approche.

Comme tous les ans, les organisateurs ont choisi une fin de semaine magnifique. Le trajet Montréal-Forestville, sous un ciel bleu éclatant, est un véritable plaisir. Les vues sur le fleuve sont à couper le souffle. J’ai voyagé avec Micheline. Elle s’est inscrite au 27 km patin (il faut assurer la relève).

Pour le lunch du midi, on s’est offert un arrêt au Massif. L’ambiance de la cafétéria me change de celle des chalets de ski de fond. Des centaines de skieurs à la démarche bizarre (ça ne se peut pas qu’ils aient tous des hémorroïdes) piétinent le plancher de bois avec leurs bottes de ski. Le brouhaha est infernal.

On a quand même profité de la vue, qui est saisissante. Un petit tour de traversier pour se dégourdir les jambes et on repart pour les derniers kilomètres. Ce sont Lise, Pierre et Bernard qui nous ont accueillis à l’Écono Lodge(1). J’y retrouve les amis et le buffet (toujours aussi invitant) avec plaisir.

Au sortir de la douche je vais retirer mon dossard (le numéro 120). C’est un bon numéro, que je connais bien et avec lequel j’ai des chances de performer. Rencontre avec les officiels, les bénévoles et quelques autres participants. L’organisation est impeccable et les préposés plein d’attention. Pour me faire pratiquer la retraite (en juin) les organisateurs m’ont vieilli d’un an sur la liste des participants. Merci.

Je prends le temps de saluer quelques connaissances et d’embrasser d’adorables visages (Ginette, tu sais que je parle de toi) avant d’aller souper avec Lise, Micheline, Pierre, Bernard, Carbone (pour le moment, son vrai nom est un secret, de même que le type de vélo qu’il vient de s’offrir), Mario et Frédéric.

Je ne le dirai jamais assez, le buffet à lui seul vaut le déplacement. Je me suis d’ailleurs déplacé quatre fois pour le dessert (à chaque coup: trois morceaux de gâteau au chocolat, nappés d’un coulis de framboise digne de mention). On a réussi à parler de rien pendant vingt minutes.

Repu j’ai pris quelques minutes pour une partie de Lego avec Micheline, avant la réunion d’information. Les participants du 100 km sont tous là.

  • Départ 7h. Si la température est inférieure à -18 °C, on part une heure plus tard.
  • Il y aura 42 motoneigistes (2) pour assurer notre protection. Allez donc trouver un autre course aussi bien organisée.
  • À partir du cinquième ravitaillement, des Power Gel seront disponibles. Une bonne initiative. J’ai jamais goûté à ça. Demain je me paye la traite.
  • Autre preuve du souci des organisateurs de nous accommoder au maximum: on peut envoyer du linge de rechange au poste de ravitaillement du 50e km.

Dring Dring!!! Le réveil m’annonce qu’il est 5h10. Brossage de dents et réchauffement sur le chemin du petit déjeuner (café et trois bols de gruau). Il faut se faire un fond pour aborder correctement la journée.

Les organisateurs ont commandé à Météomédia une météo clémente. Le thermomètre fleurte avec les -15 °C. On partira donc à l’heure prévue, ce qui me laisse le temps de tester mes skis, sous l’oeil admiratif des 42 motoneigistes. J’aurai le plaisir de rencontrer certains d’entre vousle long du parcours. Aimables et souriants vous n’avez pas ménagé vos encouragements. On vous doit tous un grand merci et un peu de notre fierté d’avoir complété l’épreuve. Pour se lancer dans une telle aventure, il ne faut pas avoir froid aux yeux (sauf Mario qui s’est gelé un oeil). Le plateau de départ est toujours situé à quelques mètres du motel. On y accède en se brossant les dents ou en terminant sa tasse de café. Serge Robert, un vieux routier du Marathon Canadien de Ski, m’entretient de ses réflexions philosophiques de dernière minute:

  • « Au Marathon on se lève à 4h00, ici on se lève à 5h00. »
  • « Au Marathon on dort dehors, ici le lit est à une minute. »
  • « Au Marathon on se lève à -32 C, ici la température est de -15°C »
  • « Au Marathon on part pour 160 km, ici on part pour 100km. »
  • « Au Marathon on peut revenir en autobus scolaire, ici c’est en motoneige avec chauffeur particulier. »

Quelle aptitude au bonheur!!

C’est le départ

À 7h, vu qu’il est exactement 7h et pour ne pas avoir à nous décongeler au micro-ondes, les organisateurs actionnent la corne du départ. Un gros merci à la foule massée le long des 100 premiers m pour avoir réchauffé mon coeur.

Comme tous les ans, un groupe de cinq skieurs, mené par Pierre Lavoie, me distance rapidement. Ok, ce sont des jeunes et en plus j’ai pas forcé pour profiter plus longtemps de l’odeur du MacDo situé au premier km.

Pour ma part, j’ai six skieurs collés aux fesses. Je suis le plus vieux du groupe; par politesse, ils n’osent pas me dépasser. Ou alors ils ont lu mon article concernant la célèbre phrase de Rénald Brière(3).

J’ai encore assez de tonus pour grimper facilement les premières côtes tout en conservant un style acceptable. Par chance, le photographe de l’événement se place en début de parcours. Les organisateurs pensent vraiment à tout. Ils ont placé quelques branches sur la piste pour obliger les skieurs à rester concentrés sur leurs skis et pour en structurer gratuitement les semelles. Je regrette une fois encore de ne pas avoir plus de temps pour admirer le paysage(4).

Mon groupe reste soudé de kilomètre en kilomètre, malgré les postes de ravitaillement. On s’y arrête quelques secondes pour un jus, un Gatorade, un carré aux dates(5) ou des glossettes. Les bénévoles ne lésinent pas sur les encouragements. Aimables et efficaces, ils nous gavent de friandises avant de nous souhaiter bonne chance pour le reste de la course. Merci encore!

Au fil des kilomètres, je m’encourage personnellement: « Il reste encore un Gatineau Loppet à skier », « Encore deux Tuque rouge et on arrive ».

Puis la mi-parcours

Les kilomètres s’égrainent lentement. Le groupe restera uni jusqu’au kilomètre 55. On commencera ensuite à perdre des skieurs. J’aurai le plaisir de rattraper et doubler un skieur du premier peloton. Au cinquième ravitaillement, un des skieurs de mon escorte part en échappée. Je ne le rejoindrai pas. Bravo! Bel effort! Tu mérites ta place.

Au passage; il paraît qu’on est dans le coin des baleines. C’est bizarre, je n’en ai pas vu une seule. Il doit faire trop froid. Pour épater le groupe, j’ai fait deux fois pipi en skiant. Je pratique à temps perdu, sur le Mont Royal. Au début, je beurrais mes skis mais avec le temps, j’arrive à faire ça proprement.

Je commence à faiblir, je n’arrive plus à rire (faut dire que le vent glacial n’aide pas à plisser les lèvres). Pour rendre le Défi encore plus défi, les organisateurs ont commandé de la neige à Météomédia. C’est une boîte sérieuse qui honore ses contrats, et vers 11h, ça commence à tomber. Ça ne lâchera pas jusqu’au soir. La piste disparaît peu à peu. Heureusement que je connais mes “Rossignol” par coeur parce que j’ai de plus en plus de misère à les retrouver sous la neige.

Dès le cinquième ravitaillement, les bénévoles nous offrent des Power Gel. J’avais jamais essayé et comme ils n’ont pas de grosse Molson tablette, je décide de compenser par un gel énergisant. Un coup de dents dans l’emballage et j’en ai plein les gants pour cinq kilomètres. Je ne sais pas si ça nourri, mais ça colle. L’emballage est resté deux minutes dans mes dragonnes, une minute sur ma cuisse et une autre minute sous mon ski gauche. Ça doit être du bon manger mou, « Ça colle au ventre ».

La fin approche

Mes neurones ont décidé de se mettre en grève et ont déconnecté mon cerveau. Une chance: je n’ai plus aucune notion, de douleur, de fatigue, de découragement. Je me souviens pourtant de la devise de Al Capone: « J’ai mal, ils ont mal. » C’est rassurant. Les autres skieurs doivent eux aussi connaître cet état second dans lequel les merveilleux fluides chimiques qui irriguent nos cellules prennent la relève. J’en perds la notion de temps. Je ne compte plus les kilomètres. J’attends l’arrivée en rêvant à une douche, au prochain Gatorade, aux copains qui suivent, (en fait il ne reste que Stéphane Deshaies), au prochain ravitaillement et aux bénévoles qui seront en mesure de m’encourager. Merci encore les filles, les gars. Vous ne réalisez pas à quel point vous êtes « responsables » de notre persévérance.

Nouveauté cette année: l’organisation offre aux participants (tous de vieilles peaux) un service de dermabrasion(6), sous les lignes de l’Hydro.

De bourrasque de vent en blizzard, de poudrerie en engelures, je viens d’atteindre le terrain d’aviation. Il reste 3 km. Je me redresse, je revisualise le cours de « One Skate 101 » (pour paraître à mon avantage). Stéphane et moi skierons le dernier kilomètre main dans la main. C’est un gentleman; il n’osait pas me doubler. Bravo. J’ai été honoré de partager sept heures de vie avec toi. On passe la ligne ensemble. On l’a bien méritée. Cette année, ce sont les sourires et les becs de Micheline qui m’ont accueilli. Un autre beau moment. La BBC, Radio France Internationale et CJMS Country sont là pour recueillir mes impressions.

J’ai dû les décevoir, mes lèvres n’ont pas été capables d’articuler quoi que ce soit. Mes félicitations pour l’idée géniale d’annoncer aux spectateurs la position exacte des skieurs aux différents postes de ravitaillement. Fan clubs et groupies peuvent ainsi suivre facilement la progression de leurs idoles.

Deux engelures sur les joues et une au menton. Le bilan est respectable.

Un petit tour sous la tente chauffée. Hot dog (un délice) et bouillon de ??? (je ne sais pas comment il est fait mais si il y en a l’an prochain, je m’inscris tout de suite). Un autre beau moment, au milieu des sourires et des félicitations. C’est vous qui méritez des félicitations pour votre accueil et votre gentillesse. Bernard Carré a failli terminer sa carrière de maître sur la ligne d’arrivée. Arythmie, asthénie, hypothermie, hypoglycémie, hyponatrémie: il n’a pas lésiné sur les ennuis. En voilà un qui sait profiter des services ambulanciers. Allongé sous la tente, réchauffé par une belle couverture, il a froid « dans » les doigts. Ça va mal.

C’est vraiment à l’arrivée qu’on profite du site. Une minute et hop, je suis sous la douche(7). Je ne me souviens pas trop clairement de la suite, le coma sans doute. Mais je vais vous raconter l’apéritif et le banquet. Comme par les années passées, c’est au complexe Guy Ouellet que bénévoles, commanditaires, officiels et participants se regroupent. Avant même d’enlever mon manteau, j’ai un verre de vin dans une main et une bière dans l’autre. Sur un écran géant qui diffuse les photos de la journée, je réussis à me voir à l’oeuvre (grâce à mon style olympien et ma tuque abominable). La photo doit paraître dans Sports Illustrated de mars.

Serge est déjà attablé, on s’installe à ses côtés. La salle se remplit tranquillement. J’ai le plaisir de rencontrer la Marchande de Sable, une artiste remarquable qui a fait pas mal d’heures supplémentaires pour créer des médailles et des trophées exceptionnels. Quel beau personnage. Lise, Micheline, Pierre, Bernard, Mario, Frédéric, William et Alain (les deux représentant du Nouveau Brunswick) partageons la même table. On est chanceux, on sera servi en premier. Le souper est excellent (j’ai encore fait du millage pour aller chercher quatre desserts et deux cafés(8)).

Micheline est toute excitée, les résultats viennent d’être affichés. Pour sa première course, elle remporte une médaille de bronze chez les… (on ne donne pas l’âge des dames, délicatesse oblige). Je vais vite jeter un coup d’oeil sur les listes. Deux charmantes personnes m’ont prêté leurs lunettes pour que j’aie accès à mon temps. J’ai une médaille. Youppi! Je vais faire honneur à la Marchande de Sable(9).

Belle cérémonie des médailles. Je n’ai pas parlé des autres courses (7, 14, 27 et 54 km). Skieurs, je ne vous oublie pas. Votre participation est essentielle, elle contribue au succès de l’événement. Bravo aux jeunes, ça fait plaisir de vous voir sur les podiums et vous méritez les ovations. Mais j’ai quand même un petit faible pour le 100 km et ses participants.

C’est Pierre Lavoie qui est rentré premier. Un bel athlète ce bonhomme et quel beau costume. Marc Bouffard est second. Mes félicitations: ta persévérance et ton sérieux dans l’entraînement ont payé. Renée Hamel est la première femme. La belle jeune fille a remporté le 100 km. En prime, son amoureux a gagné le trophée du 27 km. Ce sera la couple le plus médaillé de la fin de semaine.

Mes respects à Ralph Hendrix: il vient de Californie pour le Défi. C’est un véritable héro.

On a été sage. Quelques bières pour évacuer le stress d’aprèscourse et on s’est séparé. La soirée a dû se prolonger avec l’orchestre et la danse mais le 100 km a eu raison de mon potentiel énergétique. J’ai laissé le trop-plein de calories sur la piste. Si vous en retrouvez, servez vous.

Retour au motel et dodo.

J’ai oublié de saluer un paquet d’amis: Alain Plante, Alain Caron, Yvon Morel, Rejean et Gervais Lévesque, Stéphan Martel, et bien entendu LES ORGANISATEURS. Je m’en excuse et je répare tout de suite. Amitiés à tous, à l’an prochain.

Au fait le 100 km de Forestville est le plus long des 100 km puisqu’il fait 103 km. La dessus, personne ne pourra chialer.

– – – – – – –

(1) Un gros merci aux organisateurs.
(2) Il y en a un qui a fait une demi-heure de surtemps devant ma porte, au beau milieu de la nuit. C’était pas nécessaire, je sais que vous travaillez fort.
(3) « Quand on suit une crack comme ça, on ne double pas ».
(4) J’ai quand même demandé aux suiveux, à plusieurs reprises, d’admirer les parois rocheuses et la luminosité.
(5) Si c’est vrai que les dates constipent, je ne vais plus à la toilette pour un mois.
(6) Sablage délicat de la peau pour un rajeunissement instantané.
(7) Mea culpa pour ceux qui ont eu de l’eau tiède. C’est de ma faute. J’ai dit au gérant que j’allais faire mon cool down sous la douche: il a coupé l’eau chaude, pensant me rendre service.
(8) Un grand merci à la gentille dame qui m’a proposé un doigt d’amarreto dans le second café.
(9) J’avais peur de ne pas être sur le podium et de ne pas ramener une de ses créations.

Déc
01

Pour se dégourdir les skis cet hiver – Marathon Canadien de Ski


Pour se dégourdir les skis cet hiver…
par Paul Junique, Verdun

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La neige n’est pas tout à fait arrivée et vous vous demandez quand vous rembarquerez sur vos planches pour relever un autre défi. En attendant, pourquoi ne pas rêver à vos exploits de la saison 2009? Les deux textes qui suivent vous mettront le fartage aux skis (ou l’eau à la bouche) en vous présentant deux épreuves relaxantes et amusantes, à la portée de tous (toutes).

Marathon Canadien de Ski (160 km)

Comme tous les vieux dinosaures, c’est en septembre que je reçois (par la poste) le formulaire d’inscription au Marathon Canadien de Ski.

Ma soirée se passe au téléphone. J’y contacte les vieux routiers pour vérifier que tous ont reçu l’invitation et sont prêts à affronter une fois de plus la piste qui relie Lachute à Gatineau. Certains, plus efficaces que moi, me rejoindront avant mon appel pour s’assurer à leur tour de ma participation à l’événement. Tous les amis seront au rendez-vous. Je n’aurai pas la goujaterie de vous expliquer en quoi consiste le Marathon.

Si vous voulez être « Coureur de bois »:

  • La première année, vous skiez 80 km le samedi (Lachute à Montebello) et 80 km le dimanche (Montebello à Gatineau): vous devenez Coureur de bois bronze.
  • L’année suivante, vous faites le même trajet, mais avec un sac à dos de 14 livres (minimum): vous devenez Coureur de bois argent.
  • L’année suivante, mêmes obligations mais vous dormez dehors la nuit du samedi au dimanche: vous êtes Coureur de bois or.

Pour rompre la monotonie, le sens du parcours est changé tous les ans par les organisateurs.

Je remplis le formulaire et je me concentre à nouveau sur mes skis à roulettes.

Je pratique les chutes. Il est important de savoir se casser la figure élégamment (on ne sait jamais, il y a peut-être un touriste Japonais qui filme).

Les méthodes d’entraînement que s’imposent les coureurs de bois sont extrêmement variées. Chacun a sa recette miracle: quelques longues sorties avec (ou sans) sac à dos, nombreuses longues sorties avec (ou sans) sac à dos, quelques courtes sorties avec (ou sans) sac à dos, nombreuses courtes sorties avec (ou sans) sac à dos… Pour ma part, une dizaine de sorties, avec sac à dos, sur le Mont Royal, me conviennent parfaitement. J’y pratique le saut à la crotte, les sprints devant chiens sans laisse et le slalom au milieu des marcheurs. C’est bon pour l’équilibre. Je m’entraîne aussi à répondre aux questions existentialistes des promeneurs (« C’est quoi qu’il y a dans le sac à dos? », « Maudit gros sac ») et à ne pas répondre aux remarques niaiseuses des mêmes promeneurs (« Tu transportes ton lunch? », « T’as combien de bières? »).

Le coureur de bois ne se contente pas d’entraîner ses muscles, il apprend aussi à gérer son stress. Régulièrement, les old timers se contactent pour se remonter le moral: « S’il n’y a pas de vague de froid, on ne pourra pas passer sur les lacs », « Ils ne peuvent pas tracer, il n’y a pas assez de neige », « S’ils ne trouvent pas de commanditaires, c’en est terminé pour le Marathon », « Le pont sur la Rouge n’est plus praticable », « Les frais d’inscription vont encore augmenter »…

De stimulation en stimulation, la semaine du marathon arrive enfin. Elle est consacrée pour la plupart à un gavage de spaghettis, pizzas et tartes au sucre. Pour les autres, elle se déroule devant Méteomédia. De toute façon, la gang se retrouve le vendredi soir à la même table, au motel. C’est Michel Leblanc qui s’occupe de la logistique: réservation du motel, navettes d’autos, souper. Il a aussi la délicatesse de placer les différents maîtres par affinités, dans les chambres: les couples ensemble, les ronfleurs ensemble, les angoissés tout seuls. On a parfois la visite de Pédro et Élise. Ils demeurent à Gatineau et dorment chez eux, mais ils viennent saluer le groupe.

Pédro a participé à tellement de Marathons qu’il a un numéro permanent. C’est le 62. Il connait tellement d’anecdotes qu’il les a numérotées. On lui demande la 47 et hop, il raconte une épopée marathonesque. Élise, c’est la fée du marathon (ou la mère Térésa, au choix). Elle suit son homme d’étape en étape. Ses cris d’encouragement et son sourire nous accueillent aux postes de contrôle. Elle nous tient au courant de la progression des amis: « Les Marion vont bien et vous saluent », « Michel Millet est fatigué, il n’a que deux heures d’avance sur vous », « Pierre Harvey et Michel Leblanc sont déjà au feu. Lâchez pas, il ne vous manque que trois étapes. », « J’ai vu Dereck, il est toujours amoureux. »

Marathon canadien de ski

©Marathon canadien de ski: www.csm-mcs.com

Entre deux platées de spaghettis et quelques bières, les coureurs de bois se retrouvent avec plaisir et émotion. Le plus difficile, c’est de se reconnaître. Je n’ai vu certains coureurs qu’en habit de ski. La moyenne d’âge étant plutôt élevée, calvities et cheveux blancs sont de rigueur. Allez donc reconnaître un maître (qui n’a plus beaucoup de poils) alors que vous ne l’avez toujours côtoyé qu’avec sa tuque.

En général, la nuit est courte. Les responsables: le stress et les montres-réveil (toutes programmées pour sonner à 4 h). Il faut en effet une bonne heure pour vider et remplir six fois le sac à dos (on s’assure qu’on n’a rien oublié). Ensuite, on risque un pas ou deux dehors. Brrr, c’est frisquet. On n’en part pas moins sur le plateau de départ. Grandiose. Des torches éclairent les premiers kilomètres de la piste. Autos, camions pour les bagages, autobus, skieurs, officiels, un vrai capharnaüm. Tout le monde court, s’affaire aux derniers préparatifs. On s’interpelle, on cherche un compagnon, on salue un ami, on encourage un nouveau venu, on se bat contre la froidure, on évacue un trop plein d’émotions, on fait la queue devant les toilettes portatives.

Au kiosque de fartage (Swix généralement) Fred et Yan sont à l’oeuvre. Ils fartent et fartent et refartent.

C’est le départ

6 h. Coup de feu du départ. Un long serpent de lampes frontales va s’étirer sur plusieurs kilomètres, jusqu’aux premières lueurs du jour. Spectaculaire. Les bottes sont gelées et les premiers pas sont consacrés aux ajustements: tuque, vêtements, sac à dos. Comme tous les ans, après avoir décidé maintes et maintes fois de prendre ça relaxe, on démarre comme des malades. On en a pour huit heures de ski mais il faut partir en fou.

C’est le Marathon…

Vous vous demandez comment se déroule une étape: on discute.

Les sujets de conversation ne manquent pas: éditions passées, soirée au feu, Rideau Lake(1), copains qu’on a rencontrés, copains qu’on va rencontrer, Marathon des années passées, Marathon de l’an prochain… Les anecdotes se comptent par centaines. Il est impossible de les recenser toutes. On se souvient tous du gars qui avait la photo de Jack Rabbit sur son sac, du gars qui n’avait qu’un bras, du gars qui dormait dans un condom géant (Dereck), de la fille qui dort dans sa tente (Sharon), des sempiternels premiers arrivés au feu (les Marion), du Père Noël (Phil), de nos derniers héros (Pierre, Michel, Daniel et François Guy), du gars aux skis de bois (Michel), de Jack Rabbit, de sa fille Peggie, de la doudoune de Luc (qui tient avec du duct tape), de l’année du verglas, de l’année ou il pleuvait au feu, de celle du -30 °C, de celle de l’aller-retour sur le même trajet… Avec Pédro, on peut parler huit heures de file.

Au fil des années, on a acquis de la pratique.

Ce sont les cris d’Élise qui nous accueillent à chaque étape. Ensuite, c’est son bec (pas avant d’avoir fait estampiller le dossard par les officiels).

Les nouvelles des amis sont la première préoccupation. On se dirige ensuite vers le ravitaillement. Il faut bien remplacer les milliards de calories (excusez: kilojoules) dépensées. Alors, on fait le plein (je devrais dire le trop-plein) de bagels, biscuits, glossettes, fruits secs, peanuts, jus, soupes, boissons énergisantes. Quel délice que de plonger à pleines mains dans les glossettes. Les bien pensants qui chialent contre le gavage des oies devraient venir admirer un Coureur de bois dans sa phase de remplissage.

Rassasiés, on passe au fartage. Il y a généralement un organisme qui s’en charge: Yéti, Fresh Air… mais le coureur de bois professionnel et « parfaitement autonome » s’arrange seul avec ses skis.

Visite aux toilettes portatives, bye-bye à Élise, nouvel estampillage du dossard et c’est reparti pour une étape. La bouche pleine de glossettes, on a de la difficulté à parler. Les premières minutes sont silencieuses, mais la déglutition une fois terminée, le social reprend de plus belle.

D’étape en étape, on arrive au feu (site de campement).

Puis la mi-parcours

Les coureurs de bois or forment une caste particulière. Les groupes qui se rassemblent pour la nuit, « au feu », sont formés depuis des années. Chacun y a sa place. Rares sont ceux qui changent de feu. Les nouveaux venus peuvent se joindre à un groupe d’amis ou bien former leur propre groupe. La routine est bien rodée:

  • aller se procurer le foin pour confectionner une litière;
  • transporter la botte de foin qui supportera nos fesses pour la soirée;
  • faire une corvée de bois pour s’assurer d’un bon chauffage;
  • changer les sous-vêtements mouillés pour un ensemble sec;
  • installer le « lit »: tapis de sol, sac de couchage (le coureur de bois ne transporte pas de tente);
  • préparer le souper (2) (principalement des mets déshydratés);
  • farter les skis, directement sur la flamme.

C’est l’heure du social. On n’est pas venu uniquement pour skier, on s’est aussi ins-crit pour rencontrer les amis. Et les amis sont là, autant en profiter. On organise généralement un concours de brûlage de bottes. Tous les Coureurs de bois or ont au moins fait fondre une chaussure dans leur carrière.

Les coureurs de bois sont fétichistes. Certains conservent le même matériel depuis des lustres. On reconnait untel à sa tuque, un autre par son costume (Serge a le même costume depuis qu’il a commencé à skier en 197…), un autre à son sac à dos, un autre par sa blonde (la même depuis des années). Les bénévoles (grand merci à tous) vont entretenir les feux toutes la nuit. On aura donc le plaisir de se réchauffer au sortir du sac de couchage.

Vers 4 h, la symphonie des montres-réveil tire les Coureurs de bois de leur béatitude et de leur sac de couchage. Pourquoi à 4 h? Pour avoir amplement le temps de se geler avant le départ de 6 h. Nouvelle routine:

  • petit déjeuner(3) (encore des poudres);
  • rangement du matériel de couchage;
  • chauffage et brûlage des bottes;
  • ajustement du sac à dos (qu’on réchauffe délicatement au-dessus du feu).

La fin approche

5h45, on décolle. Rendez-vous sur la ligne de départ, pour quinze minutes de congélation collective. Quel moment merveilleux: les jointures craquent, les articulations se coincent, les épaules souffrent, le cerveau hiberne. 6h, on reprend la route pour une journée sensiblement identique à celle de la veille. On se raconte les mêmes histoires, dans un ordre différent. Pour chacune des étapes, les deux derniers kilomètres sont les plus longs. En fait on ne sait pas si la pancarte 2 km annonce qu’il reste 2 km ou que dans 2 km, il reste 2 km.

Finalement, on arrive à l’arrivée (quel beau pléonasme). Becs à Élise, sourires pour les réseaux de télévisions, quelques interviews, séances d’autographes… la routine. C’est en autobus scolaire qu’on se rend jusqu’aux douches et au banquet. La première bière est liquidée en quelques secondes mais on prendra le temps de déguster les suivantes. Le marathon est terminé, on parle déjà du prochain. Le temps de saluer les amis, d’embrasser Élise et je reprends le chemin de ma cage en ville. Je vais me reposer; dans une semaine, c’est la Loppet Gatineau et il faut refaire ses forces. Bye-bye les amis, on se revoit l’an prochain.

(1) Randonnée de vélo de 360 km qui s’étale sur deux jours entre Ottawa et Kingston (aller-retour).
(2) Je préfère un numéro 3 de chez MacDo. Il se conserve parfaitement au froid pendant la journée et se réchauffe rapidement auprès du feu (et c’est plein de calories). De plus, dans un sac, le Quart de livre ne s’écrapoutit pas. Cette année, j’ai essayé le sunday au chocolat, mais il a fondu dans mon sac (la température était clémente).
(3) Je grignote les frites de mon numéro 3.

Avr
01

La Transjurassienne

La Transjurassienne, par Réjean Charbonneau, Montréal
Extrait de l’Écho des maîtres 2008 n° 20

Pour vous situer, cette course fait partie du Worldloppet. Le Worldloppet, c’est un regroupement d’une dizaine de courses dans dix pays différents, dont la Gatineau Loppet.

Le Juras est une région du Centre Est de la France, frontalière avec la Suisse. J’avais entendu parler des centres de ski de fond de cette région par Christiane Angelucci, une passionnée de ce sport que vous connaissez certainement. C’est donc après quelques sorties en ski dans différents centres de la région que j’ai constaté que c’est vraiment un paradis du ski. On y retrouve un centre dans presque chaque village et, de plus, comme il y a eu des ententes entre les communes pour que les centres puissent communiquer entre eux, vous pouvez skier de village en village et faire de grandes boucles. Il est aussi possible de manger en chemin, soit sur une terrasse près des pistes ou dans un refuge où on vous sert certaines spécialités locales… le bonheur! Au point de vue paysage, je dirais que c’est un mélange entre les Cantons de l’Est et les Laurentides.

Le climat est plus doux qu’au Québec, mais la saison est presque aussi longue car ces villages sont en altitude, de 1000 à 1700 m, ce qui fait que les nuits sont froides et la neige tient plus longtemps. Imaginez skier entre moins 5 degrés et plus 5 degrés tous les jours… le rêve! Ce qui m’a étonné aussi c’est qu’il y a beaucoup plus de ski patin que classique; je crois que c’est dû au fait que le fartage des skis classiques est plus compliqué à cause de la température et que le style patin a pris son envol en Europe… À titre d’exemple, à la Transjurassienne le samedi en classique, il y avait 800 personnes et le dimanche en style patin, il y avait près de 3 000 personnes, dont Christiane et moi. Ce n’est pas aussi gros que la Vasaloppet en Suède où il y avait cette année au-delà de 12 000 personnes, ça c’est un peu trop pour moi. Pour ceux qui le connaissent, vous en parlerez à Jacques Wong…! Il était là cette année!

Pour revenir à la Transju, le départ s’est fait en six vagues dont les deux premières pour l’élite internationale puis quatre autres vagues. J’étais dans l’avant-dernière. Du fait que je m’inscrivais pour la première fois, j’étais relégué vers l’arrière… Comme il y avait un départ toutes les 10 min, j’ai dû dépasser des skieurs tout le long de la course. Il suffisait d’être inscrit les années précédentes pour être plus en avant! Ce fut, malgré cet inconvénient, fort agréable compte tenu de l’ambiance exceptionnelle qui se dégageait de la foule au passage aux points de ravitaillement. Le parcours de la course à été transféré un peu plus au nord car la région a connu un redoux vers la fin de janvier; c’est pourquoi le parcours initial a dû être changé par manque de neige. Au lieu d’un 76 et d’un 54 km, tous les participants devaient finalement faire un 50 km. Les conditions étaient rapides au départ, il faisait moins 9 °C sur du gros sel. Après deux heures, les conditions étaient un peu plus lentes. Cela n’a pas ralenti les premiers. À l’arrivée, on a eu droit à un sprint enlevant de 7 concurrents et c’est Marco Cattaneo, un Italien, qui a remporté la victoire en 1:49:48 (plus de 27 km/h!). Côté féminin c’est Tatania Jambaeva (oui c’est une Russe) avec un temps impressionnant de 2:02:53. Pour ce qui est « du monde ordinaire », il y avait un peu de soupe vers la fin…! L’organisation était impeccable et ce fut une expérience inoubliable. J’étais content de ma course et c’est ce qui compte.

J’ai eu la chance d’être reçu par mon amie Christiane Angelucci qui m’a fait découvrir cette région qui est, soit-dit en passant, aussi une très belle région pour le vélo. Je vous conseille la région en hiver ou en été ou les deux… et les spécialités locales, comme le fameux fromage Comté et le célèbre vin jaune, vous attraperont sûrement au passage.

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