Un peu de physiologie au service du ski de fond par Bernard Bilodeau
Au cours des dix dernières années, de nombreux changements se sont produits dans le domaine du ski de fond. L’avènement des techniques de patinage a complètement changé le sport, de sorte que la moitié des courses maintenant au palmarès est dédiée à ce style » libre » ou patinage. Avec l’engouement général vis-à-vis cette innovation, quelques études ont été produites pour mieux comprendre cette nouvelle technique. L’une des premières études sur les techniques de patinage a été publiée par le Finlandais Karvonen en 1987. Il avait démontré que les fréquences cardiaques et la concentration sanguine de lactate étaient semblables après un test de 3 km à vitesse maximale avec la technique du patinage et avec la technique classique. Il avait cependant trouvé que le patinage était 11 % plus rapide. Dans une autre étude en 1989, il avait observé qu’à cinq vitesses constantes données, la technique du patinage produisait des fréquences cardiaques et des concentrations de lactate inférieures à celles observées avec le pas alternatif.
Durant l’hiver 1989, avec l’aide de quelques professeurs de l’Université Laval, j’ai comparé trois différentes techniques de patinage, le 1-skate, le 2-skate et le offset, versus le pas alternatif et ce, sur un parcours de 3 km avec différents terrains. Les résultats ont démontré que les trois techniques de patinage sont en moyenne 16 % plus rapides que le pas alternatif. Les fréquences cardiaques et les coûts énergétiques [VO2] ne furent pas différents entre les quatre techniques et ce, sur tous les terrains étudiés. De plus, aucune différence significative n’a été observée entre les trois techniques de patinage, bien que les deux skieurs de calibre national qui ont participé à l’étude ont été quelque peu plus rapides avec le 1-skate pour le parcours complet, de même qu’en légère montée et sur le plat.
Le groupe de Hoffman au Wisconsin est très actif au point de vue recherche sur le ski de fond. Ils ont évalué les techniques classiques et le offset avec le ski sur neige, ainsi qu’en ski à roulettes. Dans toutes leurs études, ils ont démontré que la double poussée est la technique la plus efficace en terme de VO2. Cependant, la consommation maximale d’oxygène [VO2max] lors d’un exercice avec une petite masse musculaire telle que les bras, est inférieure d’environ 20 % par rapport à un exercice où les bras et les jambes sont impliqués. Donc, bien que le coût énergétique de la double poussée est plus bas versus le pas alternatif et le offset, cette consommation d’oxygène représente un plus haut pourcentage du maximum, ce qui produirait une fatigue plus rapide lors de la double poussée.
En résumé, il semblerait que pour une même vitesse de croisière, les techniques de patinage produisent de moins hautes concentrations de lactate et de fréquences cardiaques que lors du pas alternatif; à des vitesses maximales, il ne semble pas y avoir de différences dans ces mêmes paramètres physiologiques entre les techniques, bien que le patinage soit environ 15 % plus rapide.
Pourquoi les techniques de patinage sont-elles plus rapides que le classique ? Plusieurs facteurs ont été proposés pour expliquer ces différences :
- La disparition du fart de retenu sous le ski avec le pas de patineur peut être un facteur assez important. Hoffman a comparé la double poussée avec des skis adaptés pour le patinage [seulement fart de glisse] versus des skis pour le classique [avec fart de retenu] et a observé que pour une vitesse donnée, la double poussée avec les skis de patinage a produit des fréquences cardiaques, des coûts énergétiques et des concentrations de lactate inférieurs, toutes ces diminutions variant entre 1 et 5 % comparativement à des skis avec fart de retenu.
- D’autres auteurs ont suggéré que la position plus basse avec le patinage peut aider à diminuer la résistance de l’air.
- Dû au fait qu’un seul ski est en contact avec la neige lors du glissement avec la technique du patineur, la friction entre le ski et la neige est donc moindre.
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