Une patinoire grandeur nature par Bernard Samson
» Jamais vu de conditions pareilles ! On a l’impression de naviguer !, lance Pierre Laflamme, le propriétaire des industries Laflèche de Québec qui fabrique les bâtons de Myriam Bédard. C’est ultra-rapide et beaucoup plus inspirant que de rouler à l’étroit sur une piste. »
Dès février, entre Beaumont et Montmagny, la rive-sud du Saint-Laurent est transformée en une patinoire d’une quarantaine de kilomètres de longueur. N’ayez crainte ! Les glaces ont de trois à sept mètres d’épaisseur. Et l’ensemble est solide, totalement figé… jusqu’à deux kilomètres de la rive dans les anses de Saint-Vallier et de Berthier !
De plus, les fissures qui s’étaient formées en décembre sont obstruées par la neige et les vents dominants [du sud-ouest et du nord-est qui soufflent toujours beaucoup plus fort sur la rive-sud que sur la rive-nord] ont durci la surface. Bref, de février à la mi-avril, ce désert de glace, situé à moins de 30 minutes de Québec, constitue une fabuleuse patinoire pour les mordus de skating en mal d’aventures.
Mais les conditions de ski sur ces vastes espaces abandonnés aux seuls caprices de Dame nature changent du tout au tout d’un mois, voire d’une journée, à l’autre. Ainsi, une bordée de neige fraîchement tombée transforme à coup sûr le raid de skating… en expédition de raquettes. [Après une importante chute de neige, vaut mieux s’abstenir quelques jours pour laisser au vent et à l’humidité le temps de reconditionner la patinoire…].
Par contre, pendant les périodes de froid qui suivent les dégels, les plaisirs sont garantis. Mais attention aux excès de vitesse ! » La surface est rugueuse [ce qui facilite les prises de » carres « ] et très dure. Le cœfficient de friction des skis est réduit au minimum « , dit Marcel Champagne de Saint-Vallier, ce pionnier qui, le premier, découvrit tout le potentiel du site. Il ajoute : » Avec un fort vent arrière, nous atteignons des pointes de plus de 25 km/h sans forcer… »
C’est au printemps, dès que s’amorce la fonte des neiges, que les battures sont les plus belles. » Les conditions de ski deviennent magiques « , dit Marcel Champagne. [Mais méfiez-vous des redoux : à plus de sept ou huit degrés, les déplacements deviennent carrément problématiques…]
Et le paysage ? » Unique ! Lunaire ! « , assure Aurélien Thériault, professeur de littérature de 56 ans, mordu de vélo de montagne, de planche à voile et de skating sur les battures. » Sous le soleil printanier, éperdus sur la banquise, nous devenons de nouveaux Icare ! »
» Se lancer sur les battures, c’est comme plonger dans un film en cinémascope, dit Aurélien Thériault. On voit les flots bleus qui contrastent avec le blanc éclatant des glaces, cette banquise immense qui dessine la courbe de l’horizon, l’Île d’Orléans, l’Île Madame… et derrière, le mont Sainte-Anne et ce chapelet de caps qui s’étire au-delà de Baie-Saint-Paul… » Qui a dit que le ski n’était pas un » trip » esthétique ?
Aspects techniques
Si merveilleuses soient-elles, ces battures sont encore méconnues et très peu fréquentées. Ne vous y aventurez pas seul ! Allez-y à trois ou plus; question de sécurité…
En hiver, prévoyez des vêtements chauds; idéalement un » système multicouche » et un petit sac à dos… Apportez un lunch et des breuvages chauds.
Méfiez-vous du vent. Surtout par temps froid, il peut se transformer en un redoutable ennemi… mais qui ne doit pas vous empêcher de sortir ! Skiez vent de dos… en laissant un véhicule au point d’arrivée.
Les villages de Saint-Michel-de-Bellechasse, Saint-Vallier et Berthier, tous trois dressés sur la rive, constituent d’excellents points de départ ou d’arrivée. De plus, ils offrent les plus beaux paysages. Il est conseillé d’utiliser les points d’accès publics pour stationner sa voiture. À cet égard, les quais de Saint-Michel et Berthier sont dotés également de stationnements publics, alors que l’accès à Saint-Vallier se fait par la rue principale.
Janvier 1995
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