Évariste Lavoie: un compétiteur invétéré par Michel Bédard
Évariste a consacré au sport plus de 65 ans d’à peu près tous ses loisirs, bien sûr comme sportif pratiquant plutôt que sportif «d’estrade», mais davantage encore comme compétiteur invétéré, infatigable, increvable.
Le cycliste
Évariste Lavoie est né le 27 janvier 1926. Dès l’âge de neuf ans, il fréquente le Patro Saint-Roch où il joue au hockey et à la balle molle. Il expérimente par la suite pas mal tous les sports de compétition praticables : le kayak (avec son équipe, comprenant les frères Denis et Jean Barré, où il gagna le Championnat du Canada en 1966 dans le kayak à 4 places), le patinage de vitesse, les sauts de baril, le water-polo et la natation de longue distance avec les Lucien Beaumont et Jacques Amyot, la course à pied, le ski alpin, le ski de fond et, bien sûr, le cyclisme. Au début de 2004, il roulait 11 000 kilomètres et participait à bien des compétitions, dont les Championnats du monde pour vétérans à Saint-Johann en Autrichepour une 19e fois consécutive.
Rappellons-nous qu’en Europe, le cyclisme est plus populaire que le hockey. Or, notre cycliste québécois ne craint pas d’aller se mesurer, année après année, avec les grands mordus de la pédale. En 1987, il remporte même le championnat du monde de cyclisme dans sa catégorie. Il est trois fois 3e à ce championnat; une fois 2e et une fois 7e en coupe du monde. Au tour du Var sur la Côte d’Azur, il est deux fois vainqueur, trois fois 2e et une fois 4e. Il compte dix participations à la Semaine internationale du cycliste à Deutschlandsberg avec deux victoires et monte huit fois sur le podium. En 1974, il rem-porte la Maine International Bicycle Race.
Au Québec, notre increvable Évariste compte 57 années de course cycliste : il fait 29 fois la course cycliste Québec-Montréal (la course la plus longue au monde pour amateurs). Il participe à dix Tours du Saint-Laurent et en gagne une étape. On le voit aussi dix fois dans la course Québec-La Malbaie. Lors des championnats canadiens et québécois, il devient un familier du podium. En 1946, alors que la plupart d’entre nous ne sommes pas même nés, il gagne le Championnat canadien dont le départ est donné par le maire Camilien Houde.
Évariste est de toutes les courses du Mérite cycliste. Enfin, dans le circuit Super prestige des vétérans, il figure quatorze fois parmi les trois premiers de sa catégorie.
Le skieur
La saison hivernale est l’occasion pour Évariste de s’adonner au ski de fond, à la compétition bien entendu. Il est pendant plus de 40 ans un compétiteur redoutable. Il participe dix fois à la traversée du Lac Saint-Jean qu’il remporte une fois en équipe de trois. En 1974, il est le grand gagnant toute catégorie. C’est une dure traversée; Évariste s’y sera souvent gelé yeux et oreilles. Évariste aura été à la ligne de départ du célèbre et difficile Marathon canadien, une épreuve de 100 milles qui se réalise en deux jours. Il remporte ce marathon quatre fois chez les 45 ans et plus. Il monte sur le podium au Championnat du Canada, et aux Championnats de l’Est du Canada. Il est tout aussi enthousiaste de partiper à une foule de loppets et de courses régionales. Évariste possède même à une certaine époque sa propre école de ski de fond à Stoneham. Il ira même jusqu’à entraîner une équipe féminine. Cette dernière expérience s’ajoute à celle d’instructeur de ski alpin. Il fonde même le club de ski Les Montagnards au Relais du lac Beauport.
Un homme admirable
Évariste, tu auras été le champion de toute une vie. Tes 60 ans de compétition t’auront valu des centaines de trophées et des millliers de médailles. Ton atelier d’imprimerie en était plein à craquer !
Évariste, tu étais un compétiteur né, car tu étais doté des qualités requises pour en être un : discipliné, acharné, persévérant, courageux. Un tel mode de vie t’a tenu loin du mariage, mais si près de ta chère et exigeante maîtresse «la compétition».
Pour t’avoir fréquenté depuis des années en tant que compagnon d’entraînement et de voyage lors de compétitions, j’ai eu l’occasion de bien apprivoiser ton côté «vieux garçon». Malgré tout, cela ne t’empêchait pas d’aimer taquiner les filles, les petites comme les grandes. On s’est tous un jour ou l’autre fait avoir par l’une ou l’autre de tes blagues. Il t’arrivait bien entendu d’être maussade, surtout quand tu te faisais tasser ou couper par un automobiliste.
Il n’y a pas encore si longtemps, tu t’étais plaint que ton moteur avait émis un bruit étrange après que tu aies eu monté six fois le mont Sainte-Anne en une fin de semaine. Les mécaniciens ont eu du mal à trouver le trouble chez ce modèle super performant d’une autre époque. Ils auraient mis quelques additifs dans ton carburant et voilà ! Tu étais de nouveau sur tes planches. Côté alimentation, Évariste, tu as suivi les enseignements chers à nos aïeules. Toute ta vie tu as carburé au pain blanc, au steak haché et aux patates pilées De quoi rendre fou un certain Montignac. À d’autres salades et autres nourritures de lapin. À d’autres et fort heureusement pour eux, les paradis éthérés de l’alcool… Je ne t’aurai jamais vu en prendre une seule goutte …
Cher ami, tu nous a quittés à l’improviste pour le monde meilleur. On n’est pas prêt de t’oublier. Tu aura été un homme qui aura profondément marqué de nombreuses générations de sportifs. Évariste, tu n’as pas eu d’enfants, mais à combien auras-tu servi de modèle de détermination, de ténacité et de courage ? Encore la veille de ton départ, tu présidais une réunion pour organiser des activités de financement pour ta Fondation et tu nous parlais de ta prochaine participation au championnat du monde des vétérans cyclistes à San Juan en Autriche.
Même si tu nous avais montré depuis longtemps que tu étais capable d’endurer jour après jour la douleur des efforts surhumains que tes projets ont exigés, nous sommes heureux pour toi que la vie t’ait épargné des souffrances non souhaitées d’une fin de vie qui aurait pu être beaucoup plus difficile.
Tu mériterais bien aussi, toi qui fut notre ambassadeur en traversant en solo, à plus de 75 ans, tout le Canada en 2000 (6 000 km) puis tout les États-Unis en 2003 (11 000 km), qu’un bout de piste cyclable de Beauport, notre ville, porte ton nom.
Évariste, nous te saluons en souhaitant vivement que ton nom reste à jamais gravé dans la mémoire des québécois aussi comme humaniste, grâce à la Fondation que tu laisses en héritage, destinée à aider les plus démunis de notre ville.
NDLR. Michel a rédigé une partie de ce texte, publié en 1999 dans l’Écho des maîtres, que nous avons repris et adapté pour la circonstance.
Pas de commentaires
3 pings
John Gallagher a dit :
4 avril 2012 à 0 h 18 min (UTC -5)
Is this the same Evariste Lavoie who also owned a typesetting company in Québec. If so I used to service and repair his equipment in QC many years ago. I have a photo of him in a bicycle race.
We became good friends and I too didn’t drink alcohol. He was a very special person.
John Gallagher
Pembroke, ON
michel belanger a dit :
28 juillet 2013 à 15 h 20 min (UTC -5)
Yes m. galleger .this is he same evariste lavoie that you have in mind. a simple modest person dedicated to the sports ,is printing and the help of other human being.
Robert Harmegnies a dit :
30 août 2018 à 21 h 51 min (UTC -5)
Mon cher Évariste. Je me suis mis à écrire un peu ma bibliographie et je ne peux m’empêcher de parler de toi. Tu as été ma plus grande source d’inspiration et c’est vraiment grâce à toi si j’ai persévéré à faire du vélo et à poursuivre. Je sais que je t’avais déjà remercié, mais cela me fait plaisir de te le redire. MERCI