«

»

Nov
01

Vous vous entraînez pour une loppet? Faites-le intelligemment.

Vous vous entraînez pour une loppet ? Faites-le intelligemment. par Louise Poirier

En règle générale, l’exercice, c’est bon pour la santé. Le problème, c’est que les sportifs ont un enthousiasme débordant. Et cet enthousiasme conduit parfois à la blessure d’usure qui est deux fois plus fréquente que le traumatisme. Périostite, tendinite, myosite, fasciite, bursite, fracture de stress, voilà des blessures d’usure qui résultent de la surutilisation d’un muscle, d’un tendon, d’un ligament, d’un cartilage.

Ces blessures d’usure, qu’on appelle aussi blessures de fatigue, sont généralement causées par un changement dans le mode, l’intensité ou la durée de l’entraînement. Quand on attrape la piqûre de l’exercice, on ne peut plus s’en passer et une force incontrôlable nous pousse à augmenter continuellement la dose et l’on peut oublier de laisser au corps un temps d’adaptation.

Sans une bonne récupération, la mécanique du corps subit une surcharge et les tissus, au lieu de resplendir de santé, se dégradent. Une douleur apparaît, devient persistante, voire aiguë. C’est la panique, puisque le sportif blessé doit interrompre ou ralentir la pratique de son activité favorite.

Jacqueline Gareau, la reine du marathon de 1978 à 1988, a aussi été la reine des blessures d’usure. Il faut dire que la course à pied est particulièrement propice à leur émergence. Jacqueline a eu des périostites, cinq ou six fractures de stress aux pieds, des fasciites plantaires, des tendinites aux genoux et aux hanches. Pas facile à gérer pour une athlète professionnelle qui, malgré tout, a réussi à courir son meilleur marathon en 2 h 29 min 32 s.

Pourquoi a-t-elle subi tant de blessures ?  » Au départ, j’avais les pieds instables. J’ai aussi fait de mauvais choix de chaussures. Je n’étais pas non plus une grande adepte des exercices d’étirement. Mais je pense que la raison principale de ces blessures se trouvait dans ma façon de m’entraîner. J’augmentais trop rapidement le volume et l’intensité de mes séances de course. Je suivais mon intuition au lieu de respecter un programme plus équilibré.  »

En fait, plusieurs facteurs contribuent au développement des blessures d’usure. Il y a les facteurs intrinsèques, qui peuvent être plus difficiles à modifier : un manque de flexibilité, de la faiblesse musculaire, de l’instabilité articulaire. Puis, il y a les facteurs extrinsèques, qui sont plus facilement contrôlables puisqu’ils sont reliés à l’entraînement : l’usage d’un mauvais équipement ou d’un équipement mal adapté, comme des dragonnes de bâtons de ski de fond mal ajustées; un environnement inadéquat, comme un parcours cycliste comptant trop de pentes pour un début de saison de vélo; une technique déficiente, comme celle d’un grimpeur qui fait subir à ses doigts des efforts exagérés; le mauvais dosage d’entraînement — celui, par exemple, d’un skieur qui skie pendant quatre heures à sa première sortie sans s’être préparé adéquatement au préalable.

Pour Lucie Poulin, physiothérapeute chez Physio-Santé, à Hull, et professeure à l’École de réadaptation de l’Université d’Ottawa, un bon traitement ne doit pas seulement soigner la blessure, il doit s’attaquer à la cause du problème.  » Tout en soignant la blessure, il faut renforcer certains muscles, en étirer d’autres et, parfois, changer le patron d’utilisation des muscles dans le mouvement.  » Par exemple, à une skieuse de fond spécialiste du pas de patin et victime d’une inflammation de la bandelette ilio-tibiale située sur la face externe de la cuisse, Lucie a traité la blessure avec des ultrasons, du courant interférentiel, de la glace et des anti-inflammatoires. Mais elle a aussi prescrit des étirements de sa bandelette, le renforcement des muscles fessiers et un nouvel apprentissage du mouvement d’abduction de la cuisse sollicitant davantage les fessiers.

À moins d’une douleur très aiguë, Lucie ne recommande généralement pas le repos total pour soigner une blessure d’usure (de toute façon, rares sont les gens qui veulent arrêter; Jacqueline n’arrêtait jamais complètement de s’entraîner malgré ses blessures).  » Je courais dans l’eau, je faisais du vélo ou j’évitais de courir dans des montées.  »

Petit conseil : si une blessure d’usure vous assaille, n’attendez pas aux calendes grecques pour la faire soigner. Cherchez d’abord à obtenir un bon diagnostic d’un médecin compétent. Tentez de déterminer avec lui et le physiothérapeute les causes de la blessure. Contrôlez ensuite l’inflammation par des anti-inflammatoires, des applications fréquentes de glace, du repos, une compression (bandage ou taping) et l’élévation du segment blessé. Passez graduellement à l’action avec des exercices d’étirement et de renforcement prescrits par votre thérapeute. Aussi, n’oubliez pas de maintenir une bonne forme générale pour oxygéner et alimenter les tissus endommagés et pour garder le moral. Corrigez votre technique, ajustez ou changez la pièce d’équipement inadéquate et, surtout, prenez la ferme résolution de progresser raisonnablement sur le plan de la durée et de l’intensité. Jusqu’à preuve du contraire, le repos restera toujours une partie importante de la pratique sportive. Apprendre à ménager consciemment ses efforts, c’est l’art de toute une vie.

Cet article a été publié dans Géo plein air de février 1998. Nous avons obtenu l’autorisation de reproduction.

Novembre 1998

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.

You may use these HTML tags and attributes: <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>