Circuit provincial des maîtres par Chantal Métivier
NDLR : Cet article a été écrit pendant la tempête du verglas, à la lumière de la chandelle…
Depuis quelques années déjà, l’Association des maîtres en ski de fond du Québec compile les résultats du Circuit provincial des maîtres. Des courses d’envergure provinciale, accessibles aux maîtres, sont sélectionnées à travers le Québec pour composer le calendrier provincial. Les cinq meilleurs résultats de la saison de chaque membre de l’Association sont retenus pour un classement cumulatif annuel.
L’hiver dernier, j’ai participé à plusieurs de ces courses et j’ai appris, l’automne dernier, que je m’étais classée première femme, non seulement dans ma catégorie d’âge, mais toutes catégories pour 1997. C’est lors du gala en décembre dernier à la Forêt Montmorency, où avait lieu le Camp des maîtres, que j’ai ainsi reçu les honneurs chez les femmes, toutes catégories, pour la saison 1996-1997 en ski de fond.
J’ai pensé vous faire part de l’expérience vécue lors de mes courses.
1. Le Loppet du Mont-Orford, un 30 km classique, fut ma première longue course en 1997. Je connaissais déjà ce parcours qui est assez exigeant, car il y a beaucoup de faux-plats montants [ma force] et quelques descentes abruptes. J’ai eu un bon départ. Il y avait bien quelques femmes devant moi, mais je ne m’affolais pas en me disant que je les rattraperais peu à peu et c’est ce qui est arrivé finalement. Première position ! Toc !
2. Le Keskinada 50 km patin. Je me souviendrai longtemps de cette course. On dirait qu’à chaque année Dame Nature nous » flanque » une température manifestement pas de notre goût. L’année dernière, c’était froid et la neige, vous le devinerez sans doute, comme du papier sablé. Avec un classement préférentiel, j’ai eu la chance d’éviter la cohue du départ de masse. Mais, il faut dire qu’il y a toujours quelques skieurs qui partent comme s’ils avaient un pétard au cul, Keski cette année sera : d’abord, arriver au » champ » intacte. Comment ? Tenir les bâtons très fermement, faire des petits pas de patin en essayant de se faufiler parmi les skieurs moins adroits [c’est-à-dire ceux qui tombent autour de vous], patienter dans la première petite montée, car ça n’avance jamais vite à cet endroit, puis enfin, arriver à ce fameux champ.
Rendu là, il est préférable de prendre un bon souffle et de s’élancer vers la côte Pink pour encore essayer d’obtenir une bonne position en prévision de la fameuse montée Pingouin. Malgré le verglas, espérons une super édition 1998 !
3. Le Loppet du Mont-Sainte-Anne, 25 km patin, est une course à laquelle j’aime bien participer, puisque c’est un répit avant les autres courses de longues distances. Ma glisse était parfaite ce matin-là. Imaginez, j’ai dépassé des skieurs que je ne pensais jamais dépasser un jour. Seulement quelques lecteurs de cet article devineront qui…
4. Enfin, le fameux Tour du Mont-Valin d’une distance de 55 km patin qui a lieu dans la région de Chicoutimi. Celui ou celle qui n’a jamais couru le Mont-Valin ne connaîtra jamais la » vraie » aventure d’une course ! Ce mont nous réserve toujours des surprises, assez salées merci, en cours de route. Ainsi, au départ, le ciel était bleu et il faisait -5 °C. Mais bien vite les nuages sont apparus, avec quoi ? … de la neige. Nous avons dû affronter d’abondantes chutes de neige rendant la surface molle et difficile à skier. De plus, le mercure a commencé à dégringoler à -15 °C seulement une heure après le départ ! Le vent s’est levé, les rafales et la poudrerie sont venues s’amuser avec nous. Conséquences : de nombreux abandons et cas d’hypothermie, certains sérieux. Heureusement que j’étais familière avec le trajet, car à certains endroits on n’y voyait pratiquement plus rien. Et puis, oui, c’était l’enfer en montant la Côte à Boivin. Pour ceux qui ont déjà fait la course, vous savez de quoi je parle. À cet endroit particulièrement, il ventait tellement fort qu’il fallait attendre que le vent se calme pour continuer à monter cette côte abrupte. De toute façon, la seule idée dans ma petite caboche était de finir la course. Ma ténacité a porté fruit; je me suis classée première.
5. Et pour couronner la saison, Yves et moi-même avons parcouru le nord du Québec vers Labrador City, en auto, pour participer au Championnat canadien des maîtres. Presque toutes les provinces étaient là et même quelques participants venant des États-Unis. Le calibre était fort et les temps très serrés entre skieurs et skieuses. Cette fois, ce n’était pas seulement le cardio qui comptait, mais aussi le fartage et le mental surtout, car je vous assure que ce n’est pas toujours de tout repos d’avoir une skieuse sur ses talons pour une bonne partie d’une course ! Aussi, nous nous sommes vite aperçus que la neige était bien différente de celle dans l’Outaouais — à vrai dire, dans ce coin, c’est très sec.
J’ai participé à un 10 km patin, à un 5,4 combiné, c’est-à-dire que tu pars en patin et à mi-chemin tu changes tes skis pour finir en classique. Il y eut le 20 km classique et pour terminer la semaine en beauté, je me suis » tapé » un » petit » 50 km patin au parcours balisé à tous les kilomètres, ce qui aidait au point de vue stratégique et psychologique. À mi-chemin, il y avait toujours une coureuse derrière moi. Ma glisse étant bonne, j’ai décidé alors de mettre les moteurs. Vers la fin, il y a quelqu’un qui m’a crié que j’étais la première femme. Il fallait absolument tenir le coup et ne pas ralentir de peur que les autres skieuses elles aussi décident d’attaquer. Vous auriez dû me voir monter la dernière côte avant la ligne d’arrivée ! Yves m’a vue, lui. J’enjambais ça comme on monte des escaliers quatre marches par quatre à la fois ! Je n’osais surtout pas regarder derrière moi. Enfin l’arrivée !
L’organisateur m’a signalé, lors de la remise des médailles, que j’avais également accompli le meilleur temps à vie de ce Loppet. Je pensais alors, WOW !, quelqu’un de Hull et du Club Skinouk qui est à l’autre bout de la province et qui reçoit tous ces honneurs, c’est quelque chose dont je me souviendrai toujours !
Yves est arrivé premier dans sa catégorie et troisième toutes catégories lors de ce 50 km. Cela terminait bien la saison.
Nous sommes ainsi revenus à Hull avec beaucoup de » quincailleries « .
Avant de terminer cette histoire, je voudrais ajouter qu’Yves mérite une médaille spéciale pour m’avoir encouragée tout au long de mes courses et surtout, sa patience extrême lors des décisions à prendre pour le choix du fartage.
Voilà donc ma longue histoire sur le comment et le pourquoi de mon classement de » première » au circuit des maîtres.
Mai 1998
Laisser un commentaire