La course par Gaston Lemieux
Dans quelle galère me suis-je embarqué ? Après deux ans d’absence ou d’abstinence pour les fanatiques du cierge, j’ai décidé de renouer avec la compétition. Après tout, le ski de fond n’est-il pas le plus fantastique des sports, quand il ne fait pas trop froid ?
Ce matin-là, à -5 °C, la température était pour moi idéale et la glisse aussi. Arrivé sur la ligne de départ » en retard « , mon petit moteur pas très bien réchauffé semblait quand même fringuant. Mon départ m’est apparu, ma foi, intéressant puisque j’avais rattrapé et dépassé deux skieurs après le premier kilomètre. Eh oui ! mon petit quatre cylindres à douze soupapes tournait à fond de train. Mes pneus bas profil me permettaient d’obtenir une superbe tenue de route. Grâce aux pneus à gomme tendre choisis pour cette course, l’adhérence était excellente.
Mais voilà qu’à l’approche de la seule bonne montée du parcours, l’un de ces engins me dépassa. À le voir filer, j’ai conclu qu’il s’agissait d’un de ces bolides genre BMW équipé d’un gros quatre cylindres avec deux arbres à came en tête et seize soupapes et, de la puissance à revendre… Bien sûr, j’ai tenté de profiter du phénomène d’aspiration connu et utilisé en course » automobile « , mais peine perdue. À l’amorce de la montée, je commençais déjà à rétrograder. Ma boîte de vitesse, bien que synchronisée, devait être constamment sollicitée, si bien qu’à moitié côte, j’étais en première vitesse et mon petit moteur, lui, à plein régime mais hélas sans puissance parce qu’en asphyxie, presque à l’agonie.
Pendant ce temps, l’engin qui m’avait dépassé, quelques secondes auparavant, avait franchi l’épingle puis atteint le sommet de cette côte. Naturellement, ces bolides modernes munis de boîtes séquentielles à six rapports et parfois de transmissions intégrales dont les moteurs poussifs à l’extrême sont, pour moi, impossible à rejoindre. Mais pourquoi s’en faire ! D’abord, ces supers bolides sont généralement dans une classe distincte et surtout, ne suis-je pas là que pour l’amour du sport, du ski.
Revenons à la course. À mon tour, j’ai atteint le sommet de la côte, heureusement sans dommage apparent à ma petite cylindrée, quoique mes suspensions m’ont paru très ramollies. Enfin, j’ai pu enchaîner et poursuivre mon parcours sans avarie jusqu’à l’arrivée.
L’analyse de cette course m’a permis de constater que j’avais piloté presque entièrement le parcours à la limite des capacités de ma machine. L’usure minime à mes pneumatiques est peut être l’indice d’un manque flagrant de puissance moteur et de motricité. Néanmoins, je suis heureux de cette course et c’est un bilan positif.
Pour conclure cette description comparative un peu loufoque, pourquoi ne pas lancer l’idée farfelue d’une répartition, non plus en catégories d’âges, mais plutôt en catégorie selon les capacités physiologiques et cardio-vasculaires pour utiliser le langage des experts ?
1994
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